Oz et Amir fondent en 2001 la structure Street Fabulous. Avec Marv’Lous, Prinzly et One Shot, ils produisent plus d’une centaine de morceaux entre les années 2000 et le début des années 2010. Parmi leurs prods les plus connues, on peut citer des titres iconiques de Booba (Garcimore, Carton Rose, Pourvu qu’elles m’aiment), La Fouine (Autopsie 5, J’avais pas les mots), Diam’s (Big Up, Me revoilà) ou encore Despo Rutti (Dangeroots, Rédemption). Au milieu des années 2010, Oz et Amir réduisent leur activité de compositeurs pour se consacrer à l’entrepreneuriat, ils font deux rencontres déterminantes : Hamza et Ponko. Ils prennent immédiatement les deux artistes sous leur aile, et les aident à se structurer, pour devenir l’un des duos francophones les plus influents de la décennie, jusqu’à la consécration de l’album Sincèrement. Rencontre.
Ventes Rap : Au départ, vous êtes une équipe de beatmakers, Street Fabulous. Comment est-ce que ça se met en place ?
Oz et Amir : On a commencé à deux en 2001. On a ensuite étoffé l’équipe avec Pegguy et Abel. On est redevenus deux. Enfin, on a été rejoints par Youssef (ndlr. Marv’Lous), puis Prinzly, et One Shot. On va dire que c’était les cinq Street Fabulous déterminants. On a surtout développé le côté prod à cette époque. On se concentrait sur le fait de pitcher des morceaux, et en quinze ans on a eu le temps de faire 2-3 fois le tour du rap français. On signe en édition à ce moment-là. Vers 2013-2014, on décide de développer la partie publishing, en signant nous-même des compositeurs cette fois-ci, notamment Prinzly et Ponko. À ce moment-là, on commence à faire moins de prods pour plutôt s’occuper des plus jeunes, en se concentrant sur le business.
Amir : Quand on opérait sous le nom de Street Fabulous, c’était la pire période niveau ventes de disques. Les gens prétendaient qu’on roulait sur l’or parce qu’on plaçait énormément, mais en réalité à l’époque, il y avait très peu de Sacem et nos singles n’étaient pas vraiment radiophoniques.
Oz : On a travaillé avec beaucoup de partenaires de travail différents. Au début, on était chez Because en édition pure. Directement à la fin du deal avec Because, on a switché en tant que co-éditeurs, et désormais on ne pratique que de la gestion. Cela veut dire qu’on est éditeurs à 100% de l’intégralité de la musique, et qu’une société de gestion d’éditions nous aide uniquement pour la partie administrative.
Ventes Rap : Comment voyez-vous l’évolution du game des beatmakers, avec notamment beaucoup plus de beatmakers aujourd’hui qu’auparavant ?
Oz : Il y avait moins de beatmakers mais les gens avaient toujours autant la flemme de payer les beatmakers ! La chance qu’on a eu, c’est que les gens venaient nous chercher, donc on était en position de force au moment de la négociation. On a toujours réussi à valoriser notre travail, sans le brader.
Amir : Cependant, ce qui a changé aujourd’hui, c’est que les intermédiaires sont beaucoup plus souvent des indépendants que des majors. Je comprends les plus jeunes qui se plaignent. Si tu n’as pas une bonne équipe autour de toi, c’est très difficile.
Hamza : Ce que je remarque avec les jeunes compositeurs, c’est que c’est devenu beaucoup plus facile de faire des prods qu’auparavant. Beaucoup de beatmakers font des prods à la chaîne, des packs de 1000 prods tous les mois, mais dans les 1000 prods, il n’y en a peut-être qu’une seule de potable. Et encore.
Oz : Les jeunes beatmakers ont rarement le réflexe de valoriser leur travail. Ça leur porte à faux. De notre côté, on a toujours été intransigeants. Nos conditions étaient très claires : un flat, un fee et des points. Tu ne veux pas de ça ? Va chercher tes prods chez les autres. Ça a imposé une forme de respect, car on ne se laissait pas marcher sur les pieds. Pour les compositeurs qui signent chez nous, c’était tout de suite plus facile car les gens de l’industrie savaient qu’on ne rigolait pas avec ça.
Ventes Rap : En parlant de compositeurs, comment s’est effectuée la rencontre avec Ponko ?
Oz : On a rencontré Hamza par le biais de Prinzly, et j’ai rencontré Ponko par le biais de Hamza. C’est deux raisons pour lesquelles je ne crois pas au hasard. Quand j’écoutais les sons de Hamza, c’était instinctif. Comme on a toujours donné beaucoup d’importance aux prods, je demandais qui faisait la prod de tel morceau de Hamza. À chaque fois on me disait « c’est Ponko ». J’ai demandé à Hamza s’il était signé et il m’a dit : « Pas encore. Franchement signe le, il est super chaud ». J’ai eu la chance de les rencontrer tous les deux au même moment.
Ventes Rap : Comment expliquez-vous la longévité de Ponko, dans un environnement de beatmakers où les têtes tournent très rapidement ?
Oz : Je pense qu’il y a une grosse demande pour Ponko, car au-delà du fait qu’il soit productif, c’est un mec qui est très singulier, très éclectique. A chaque fois qu’il intervient sur un album, l’artiste sait qu’il va amener sa patte.
Amir : Il ne faut pas oublier que c’est un développement sur 10 ans. Prinzly on le connaît depuis qu’il a 16 piges, Ponko depuis 2014. Je dirais même qu’on est bénis, car on sait qu’on travaille avec des génies. On se l’est dit plusieurs fois avec Oz : si on ne les avait pas rencontrés, on aurait déjà arrêté depuis longtemps. La musique est un milieu très dur, et si la passion ne te porte pas, tu arrêtes très vite.
Oz : Si tu n’as pas le mental, tu ne tiens pas dans le milieu de la musique. On connaît des gens qui ont le même parcours que nous, et qui ont arrêté depuis longtemps, car ils n’arrivaient pas à assumer cette pression inhérente au milieu de la musique. C’est tous les jours un combat.
Amir : On n’a jamais été salariés de qui que ce soit et on n’a jamais eu de confort. Cependant, on voit qu’avec le temps et le travail, ça porte ses fruits. Quand on voit Ponko et Prinzly, tu te dis que rien n’a été volé et rien n’a été donné non plus.
Ventes Rap : Et concernant Hamza, à quel moment a lieu la rencontre ?
Oz : Je le rencontre juste avant H24. Ça a été très évolutif. Au début, j’étais plus là comme un frangin et Hamza avait déjà une équipe autour de lui. J’ai un peu contribué à faire bouger les choses, j’envoyais sa musique aux contacts que j’avais déjà dans l’industrie musicale, qu’il s’agisse de labels ou d’éditeurs. À l’époque, il s’agissait plus de faire l’intermédiaire entre la structure qui était déjà en place et les gens en France. De fil en aiguille, des choses ont changé. L’équipe s’est restructurée mais on a continué de bosser ensemble avec Hamza et depuis 2014-2015 la collaboration ne s’est pas arrêtée.
Hamza : Oz a toujours été très proche de moi. Au niveau du business, il m’a toujours beaucoup appris, ainsi qu’aux équipes que j’avais à l’époque. Ce n’est que depuis le début de la conception de Sincèrement que l’association à trois est officielle. Au niveau de la musique, même si Amir a composé Vibes, on peut dire que les équipes étaient déjà formées et que je n’avais pas forcément besoin d’aide. Par contre, niveau business, ils m’ont tout de suite énormément apporté.
Oz : De base, on se bat pour les artistes de chez-nous (Bruxelles, ndlr) et pour moi Hamza est l’un des artistes les plus identifiables et les plus authentiques que j’ai rencontré. Au-delà du fait qu’on travaille ensemble, on est très objectifs par rapport à sa musique.
Amir : Notre but c’était qu’il ne refasse pas les mêmes erreurs qu’on a pu faire au début de notre carrière. Dans les éditions, c’est souvent compliqué au début. On a mangé beaucoup de pierres, et je pense que Prinzly, Ponko et lui bénéficient de notre expérience aujourd’hui.
Ventes Rap : Quel regard portez-vous aujourd’hui sur les débuts, où Hamza ne vendait que quelques centaines de disques sur des projets comme Zombie Life ?
Amir : Certains mecs se seraient arrêtés après un flop, mais Hamza lui n’en avait rien à foutre. Il voulait juste faire de la musique. Si ça marche, tant mieux, mais son but premier c’était juste de faire de la musique par passion.
Oz : Et ce sans se dégoûter, ce qui est fort. C’est pas donné à tout le monde de surmonter ce genre d’échecs. Je sais qu’Hamza est un artiste pur dans l’âme, et qu’il a une force mentale exceptionnelle. Quand je regarde des mecs comme Ponko ou Prinzly, c’est des vrais soldats également. Qu’il y ait une maladie, un problème familial, tu leur dis qu’il y a une session studio, ils seront toujours au rendez-vous. Pour te citer un exemple, on a tous eu à un moment donné un taf à côté de la musique. Quand on est devenu pères de famille, la musique ne rapportait rien et il fallait assurer.
Amir : Toute la période avant le streaming était pourrie.
Oz : Certains ont mis la clé sous le paillasson, et après, il y a des gens comme nous qui ont tenu bon. On n’a jamais lâché. Pour diverger, je sais qu’un truc qui m’a donné envie de continuer dans la musique, c’est ma rencontre avec Hamza. Je pense qu’au fil des années on a développé une toute autre relation. Depuis Sincèrement, on est tous les trois ensemble, mais sur les albums précédents, je m’étais déjà occupé en grande partie de la réalisation artistique.
Ventes Rap : Quelle est la différence entre Trez Records et Just Woke Up ?
Amir : Pour faire clair, on a Prinzly et Ponko signés en co-édition chez Trez Records. Prinzly est produit en tant qu’artiste chez Trez Records également, pour le projet « Passager 8 ». En parallèle, Oz et moi sommes managers d’Hamza et associés avec lui. Cependant, Hamza est propriétaire de Just Woke Up. Enfin, on est associé dans Just Woke Up Publishing, une autre boîte d’éditions dans laquelle sont signés Pierrari et Lucozi.
Oz : Quand il y a eu la rupture avec la première équipe avec laquelle Hamza travaillait, la seule solution que voyais pour lui c’était l’émancipation. Il devait devenir son propre boss. C’est arrivé juste avant qu’il signe chez Rec. 118 en licence, juste avant 1994.
Hamza : Quand j’ai créé ma première boîte Just Woke Up, à la base j’avais des propositions de signature. C’est Amir qui est venu me voir : « sois-tu signe en artiste, sois tu montes ta boîte et tu rentres dans le monde du business ». C’est lui qui m’a accompagné vers ce chemin. C’est ce qui a fait que Just Woke Up existe toujours, et que je suis propriétaire de mes masters. Peut-être que sans lui, j’aurais signé en artiste et je n’aurais pas été maître de ma musique.
Amir : C’était important pour nous qu’Hamza soit propriétaire de ses masters et de ses éditions. Je pense qu’à l’heure actuelle, il n’y a pas beaucoup d’artistes qui sont dans sa situation, c’est-à-dire propriétaire de l’intégralité de ses projets et propriétaire à 100% de ses éditions.
Oz : On peut rajouter également qu’il est co-producteur de sa tournée.
Hamza : Après il faut souligner que j’ai eu de la chance de vous rencontrer. Pour un jeune qui démarre dans la musique, tu ne peux pas savoir tout ça.
Oz : C’est un choix. On aurait pu à l’époque profiter de la naïveté et proposer un deal bidon, lui dire de signer sur le label. On était dans une démarche saine et familiale, d’émancipation de l’artiste dans une vision de long terme. La relation qu’on a créée à trois, au-delà du business, c’est une relation de respect. On se considère comme des frères. Bien sûr, chacun a son intérêt, mais à chaque fois on essaye de faire du business de la manière la plus saine possible. Tout est fait en transparence. Bien évidemment, parfois nous avons des désaccords, mais à chaque fois on se dit les choses. Ce qui est bien, c’est que personne ne laisse les choses pourrir. Même si c’est dur, on dit toujours tout. On ne se ment jamais et il existe une grande confiance entre nous trois.
Amir : A la fin ça demeure l’album d’Hamza et c’est lui qui fait les choix finaux. Cependant, je pense que ça fait partie de l’intelligence d’un artiste de se remettre en question et d’accepter la discussion avec son équipe.
Oz : En termes de musique, j’ai tellement pris l’habitude d’être en studio avec Hamza depuis avant H24. Je sais comment il travaille et je sais que quand le truc sort, il a donné 100% de son énergie. Quand ce n’est pas à la hauteur, je lui dis directement : « frérot je sais que tu peux faire mieux ».
Amir : Après il est déjà très exigeant avec lui-même. C’est très rare qu’on reçoive des morceaux où on se dit que c’est mauvais. Même les pires morceaux ont malgré tout un certain niveau.
Hamza : On est très exigeants là-dessus.
Oz : Nos problèmes, musicalement, sont des problèmes de riches. On choisit en fonction des émotions, de la direction artistique qu’on veut donner au projet, mais en réalité, il y a très peu de choses à jeter.
Ventes Rap : D’ailleurs, l’écart de temps entre Sincèrement et 140 BPM 2 est le plus grand de sa carrière. Est-ce que c’était un choix volontaire de votre part ?
Oz : Tu vas nous lancer sur un grand débat ! Déjà pour revenir sur 140 BPM 2, des situations ont fait que l’on a dû stopper l’exploitation du projet en cours de route. On devait clipper deux morceaux supplémentaires et finalement il y a eu des complications avec le label. Si tu regardes avec le recul, pour moi les gens n’ont pas bien pris le temps d’écouter le projet. C’est 14 propositions de drill totalement différentes les unes des autres. Je te dis ça en toute humilité, les gens ne connaissaient même pas la drill en France qu’Hamza avait déjà fait deux morceaux drill dans Santa Sauce 2. C’est un des problèmes artistiques qu’on a eu, on a toujours eu une longueur d’avance. C’est culturel, la Belgique est un pays plus anglo-saxon que français dans la musique. À la télé, à la radio, c’est ce type de sons qui passent. Depuis des années, on est nourris de rap cainri. Dès 2014, Hamza faisait du R&B, des influences qu’il partage avec son père. Il a écouté des vrais morceaux comme ceux de Jodeci, et ça l’a influencé. Il a été un des premiers à s’émanciper dans ce style-là. Au début, il y avait un gap trop grand entre lui et ce qui se faisait sur le marché, mais avec le temps les sorties ont su s’adapter.
Amir : Paradise, aujourd’hui ça en parle comme un classique, alors qu’à l’époque, les gens ne calculaient pas tant que ça.
Oz : D’ailleurs niveau business, il y a quelque chose de très intéressant avec un artiste comme Hamza. Là où certains artistes ont des pics et redescendent, la carrière d’Hamza a plutôt fait un crescendo. Quasiment tous les projets finissent certifiés or ou platine, et là avec le succès de Sincèrement, des jeunes qui le découvrent sur cet album vont redécouvrir son back-catalogue. Sa musique vit à travers le temps.
Ventes Rap : Gazo, Zed, Niska, Tiakola, Guy2bezbar… Est ce que la série d’apparitions d’Hamza en featuring en 2021 et 2022 était calculée ?
Amir : C’était le début de la stratégie.
Hamza : Je voulais m’ouvrir. Je faisais très peu de featurings avant.
Oz : Il y avait beaucoup de demande aussi.
Hamza : Après beaucoup de featurings se sont fait naturellement. Par exemple Leto et PLK, des belles rencontres avec beaucoup de feeling. Chrome Hearts avec Dinos, Atasanté avec Tiakola pareil. C’était pensé dans le sens où je savais que je n’allais pas être présent en solo donc il fallait continuer d’occuper le terrain. Je voulais aller sur le terrain des autres artistes. C’était un kiff pour moi vu que je faisais pas de featurings avant.
Amir : Il est passé d’artiste de niche à artiste populaire. Les demandes sont venues d’elles-mêmes.
Oz : C’est intéressant ce que tu dis là, car je peux souligner que les gens avaient une idée de nous qui n’était pas la bonne. On n’était pas du tout inaccessibles, bien au contraire. Une fois que ça s’est décoincé, ça s’est fait de manière très spontanée et naturelle. Je pense que ça a permis au grand public d’identifier Hamza et de le voir comme un vrai artiste. Imagine que t’es un fan de l’artiste X, que t’écoutes son feat avec Hamza et que tu sens Hamza très à l’aise, ça va te donner une bonne image immédiatement. C’est là où on s’est rendu compte que les retours étaient souvent unanimes sur les performances d’Hamza. C’est ce qui a aidé à populariser Hamza auprès du grand public, de le mettre sur des exercices de style où il est très à l’aise, du fait qu’il est très éclectique dans son travail. C’est sa force à lui, tu peux le mettre sur n’importe quel support musical, il va faire le job.
Oz : C’est sa force à lui. C’est cela qui a beaucoup plus au public directement. La période des feats a duré un peu plus de 2 ans, puis à l’été 2022, il y a eu la cerise sur le gâteau avec Fade Up.
Ventes Rap : Au moment de la sortie de Fade Up, beaucoup ont parlé d’un projet commun avec SCH…
Amir : Il y avait un projet commun avec SCH. Le projet ne s’est pas fait car on était en plein confinement, c’était une période difficile et en matière de planning on a pas réussi à s’accrocher. Chacun a eu ses priorités ensuite, on est parti sur un projet tandis qu’il est aussi parti sur un projet. Pour l’histoire, Fade Up faisait partie des morceaux qu’on voulait garder pour ce projet.
Ventes Rap : Est-ce que le leak était volontaire ?
Oz : Le leak était pas volontaire du tout. La réception du leak, c’est ce qui nous a poussé à le sortir.
Hamza : D’ailleurs le morceau n’était pas fini. Mon couplet n’était pas encore présent.
Ventes Rap : Les collaborations du projet ont une orientation très internationales. Comment est-ce qu’elles se sont mises en place ?
Oz : Ca s’est fait de manières différentes. Avec Offset, ça s’est fait naturellement. Il était venu à Paris pour la Fashion Week et une personne nous a fait comprendre qu’elle pouvait nous le faire rencontrer. On s’est dit « pourquoi pas ? ». A ce moment précis, on était en séminaire dans le sud de la France. On s’est dit « let’s go » et on est remonté à Paris . Ce qui a facilité les choses, c’est que le mec avait écouté sa musique et avait validé sa musique. Quand ils se sont rencontrés, c’est allé très vite. Ils ont mis le son, ils ont écouté le son, Offset est rentré en cabine et a posé son couplet.
Avec Ckay, on était en session au studio. On parlait dans le couloir Hamza et moi, et Ckay posait à ce moment-là dans une autre cabine. Ckay sort et dit à Hamza : « ça fait longtemps que j’écoute ta musique, ce serait cool si on pouvait faire un morceau ensemble », et c’est ainsi que ça s’est fait.
Ventes Rap : Comment est-ce qu’ADA est intervenu dans la promotion de l’album ?
Amir : ADA était là bien sûr. Je ne vais pas te cacher qu’on se suffit à nous-même en tant qu’indépendant. Avec Just Woke Up, on fonctionne comme une maison de disques. On va chercher les prestataires nous-mêmes. Qu’il s’agisse d’attachées de presses, de marketing, des équipes créatives, on les a nous-mêmes. Après le petit bonus, vu qu’on est en distrib chez ADA, c’est qu’ils ont quand même offert leurs services à leur manière. Alassane, Eros et Nicolas nous ont beaucoup aidé. Ça a été une plus-value. Ce sont des gens qui ont de l’expérience.
Ventes Rap : Est-ce que vous pourriez signer un artiste qui n’est pas un proche ? Par exemple, un jeune très talentueux à Bruxelles ?
Hamza : C’est compliqué, on est exigeants !
Oz : Aussi, vu dans quoi on est actuellement, entre Hamza, Prinzly et HD la Relève, on a pas 10 têtes, on va se disperser si on part sur trop de fronts en même temps.
Amir : Il faut qu’on ait, comme avec Hamza ou Prinzly, ce truc qui fait qu’on va se donner à 1200%.
Hamza : C’est comme quand tu tombes amoureux, quand tu écoutes un artiste, dès la première fois tu sens que quelque chose se passe.
Oz : Le facteur humain est très important aussi. Il y a des bêtes d’artistes mais qui n’ont pas ce côté-là. Les gens ne se rendent jamais compte de ce qu’il y a dans la tête d’un artiste, car ils ne mangent que le résultat final. Ils ne comprennent pas le processus, tout ce que l’artiste a enduré d’un point de vue émotionnel ou stress. La musique c’est énormément de stress. T’as beau avoir confiance en toi que tu veux, le jour où ton album sort, tu auras forcément une boule à l’estomac. C’est beaucoup à supporter, beaucoup à porter sur les épaules, beaucoup de psychologie et surtout beaucoup de mental. Dans la musique, si tu n’as pas le mental, tu es mort. Je vais même aller plus loin, pour faire une carrière dans le côté créatif, il faut être un petit peu fou. Un artiste passe par plusieurs périodes : quand il n’y a pas de succès, quand il y a un petit peu de succès et quand le succès vient enfin. Une fois arrivé dans cette période, tout change autour de toi en tant qu’artiste et il faut avoir les épaules pour le supporter
Ventes Rap : D’ailleurs Hamza, est-ce que pour toi c’était difficile à vivre la période où il n’y avait pas de succès ?
Hamza : Ça m’a jamais vraiment touché. Dans ma tête, je savais que ça allait arriver un jour et je prenais mon temps.
Amir : Et c’est allé vite en vrai ! S’il vend 10 000 disques, il fait plus de chiffres que des mecs signés en artiste.
Oz : Quand je l’ai connu, il a dû enregistrer plus de 200 morceaux en un an. J’envoyais des maquettes en maison de disque avant la sortie de H24, personne ne calculait, et évidemment après le succès d’H24, ils sont tous revenus. Les gens étaient choqués, ils venaient là en pensant écouter 5-10 morceaux, et ils revenaient avec 200 morceaux à écouter. La vérité, j’arrivais le matin, il était en train d’enregistrer un morceau, je revenais le soir, il y avait 5 morceaux finis.
Hamza : À cette période, ça ne me dérangeait pas. Avec Ponko, on était à fond dans l’amusement. J’avais 50-100 balles par semaine, j’avais ma tise, ma fumette et je dormais au studio. Je mangeais même pas à l’époque. On s’en foutait, on s’amusait. Il n’y avait pas du tout ce truc de : « il faut le succès », « quand est-ce que je fais de l’argent », etc.
Oz : Ce qui est incroyable, c’est que malgré la partie économique qui est venue ensuite, en réalité, l’état d’esprit d’Hamza n’a jamais changé. C’est pas quelqu’un qui rentre en studio en se disant qu’il veut faire un hit. Il veut d’abord faire de la musique qui lui plaît, et si la musique rapporte de l’argent c’est bonus.
Photographies : Arthur Bresset