Pour être honnête avec vous, j’ai eu du mal à écrire cette chronique car Dieu sait à quel point Niro est un de mes rappeurs préférés… Mais je me dois d’être objectif, et donc je me permets de dire que rien ne va plus avec Niro et cet album m’a définitivement convaincu qu’il fallait tirer l’alarme. La rumeur d’un album surprise commençait à tourner dans la street’zer et les réseaux sociaux, ce qui divisait déjà les auditeurs entre ceux qui se réjouissaient et ceux qui étaient septiques au vu des chiffres de ventes des précédents projets de Niro. Le 28 mai est donc sorti Or Game 3ème album de Niro, à peine 7 mois après Si je me souviens son précédent album. Dans un rap français qui a adopté un rythme d’un projet tout les 6 mois digne d’une séance de cardio avec la team de BeMutated, la sortie d’Or Game est donc dans les temps. C’est connu, la plus grosse crainte avec ce court laps de temps entre les sorties est la perte de qualité ou de nouveauté d’un projet à l’autre et avec Or Game ces craintes sont confirmées.
Aucune évolution…
Certes la qualité du projet reste intacte (encore heureux, on parle de Niro quand même), la seule nouveauté de l’album sont les morceaux. Aucune innovation, aucune prise de risque, on a l’impression d’écouter un Si je me souviens Part. 2. Attention, je ne dis pas que l’album est nul… Il est lourd mais c’est toujours la même chose. En trois albums, de Miraculé à Si je me souviens et maintenant Or Game, la seule innovation c’est l’utilisation de l’autotune qu’il s’est efforcé d’utiliser. Dans un rap français de plus en plus américanisé, Niro donne l’impression d’être à contre sens, ce qui plaît à ses fanatiques habituels à coups de « Niro c’est un vrai, il suce pas les kainrys ». Mais d’un point de vue objectif, il n’évolue pas. On a donc un bon album mais sans plus, on ne sent pas ce changement entre deux projets. Par exemple, ceux qui ont écouté Charo Life et Zifukoro de Niska ont remarqué une évolution dans sa musique, pareil pour SCH avec A7 et Anarchie.
Le changement, c’est maintenant
Niro est un kickeur, un performeur, un lyriciste hors pair et ça personne ne peut le nier, qu’on soit d’accord… Mais ensuite? Certes vous allez me dire qu’il fait la musique qui lui plaît et il n’a pas à se travestir (c’est pas ce qu’on lui demande) et « ouais mais c’est un vrai lui au moins », mais tenter de nouvelle chose ça ne tue pas, regarder un peu vers Atlanta ne tue pas surtout dans une période où la Trap va hyper vite et propose maintenant plusieurs styles différents et facilement accessibles. S’approprier certaines choses, ça ne tue pas non plus, maintenant qu’on a fait le tour de tous les rappeurs d’ATL: finis les risques de « non c’est pas lui qui a fait ça, y’a eu 2 Chainz ou Migos en premier ». Il faut donc se projeter et prendre des risques, ce qui aurait du être le cas avec ce projet surprise qui en soit est déjà une énorme prise de risque.
Plaire à la street c’est plaire aux ingrats
Cette citation me vient d’un gars de chez moi et vise surtout les fans adepte du « Niro il est sous-côté! Il a pas les ventes qu’il mérite! Il est boycotté! » La réponse à tout ça est tout simplement: non.
Non, Niro n’est pas sous-côté, il est d’ailleurs l’un des rappeurs qui fait le plus l’unanimité dans tous les quartiers et cités de France. Non, il n’a pas les ventes qu’il mérite (sauf pour Or Game sincèrement) mais quand on voit le public visé c’est normal… Niro est l’un de ces rappeurs faisant un rap mature, qui pue la street, qui te la vend sans rêves et ni strass ni paillette à une époque où les gens veulent qu’on leur vende du rêve. Boycotté? Non plus. Récemment, on l’a vu se plaindre sur Twitter auprès de Laurent Bouneau mais soyons réalistes, ce n’est pas un matraquage en radio qui aurait changé quelque chose. On a même l’impression que Niro ne change pas pour faire plaisir à cette partie de ses fans qui adorent son côté « vrai gars de la street » mais au final, quand les chiffres tombent, ces mêmes fans préfèrent mettre 10€ dans une chicha et faire un tour sur ProZik plutôt que de soutenir Niro.
Pour conclure
L’album reste relativement bon, notamment un bon choix au niveau des prods. Mais vous l’aurez compris, l’album ne m’a pas réjoui plus que ça, non pas à cause de sa qualité mais par rapport à son contenu même. Je m’attendais à une évolution, étant donné que j’écoute encore Si je me souviens, donc le fait d’avoir sa deuxième partie 7 mois plus tard… Voilà quoi… Tout ce temps pour ça c’est du gâchis et une perte de temps. N’en déplaise aux fanatiques adeptes des gorges profondes les yeux fermés, aujourd’hui il faut le dire: Niro va droit dans le mur, et c’est encore plus désolant quand on sait que c’est un grand artiste. Le souci avec cette album, c’est qu’il a confirmé les choses que je me disais déjà à la sortie de Si je me souviens qui ressemblait déjà beaucoup à Miraculé mais qui était quand même relativement différent alors que ce dernier opus n’apporte rien de nouveau. Tant de bruit pour rien au final. En espérant que dans 6 mois ou plus, Niro revienne avec un projet qui nous mettra définitivement d’accord.
Je termine donc sur une citation qui met revenu à l’esprit en écoutant le morceau 87: Aujourd’hui, le problème de certains artiste qui ne marchent pas ou qui n’arrivent pas à se renouveler, c’est qu’ils n’ont pas de gens sincères autour d’eux. Ils rentrent en cabine, tout le monde dit lourd car ils ont peur de les vexer! Ils sont en studio avec des mecs qui, tant que le rappeur dédicace les quartiers de France, disent que c’est lourd alors que le son n’est pas bon. Donc, ils sont dans une matrice où ils n’ont pas de recul. Il suffirait qu’un seul ami sincère lui dise « rentre en studio car avec ce qui se passe à l’extérieur si tu débarque avec ça tu vas te prendre un mur » (Maître Gims).