C’est l’histoire d’un rappeur qui en quelques années a doublé le nombre de ses fans, l’histoire d’un MC qui a triplé le nombre de ses ventes. Inutile de faire une rétrospective sur la carrière de Niska cette dernière a été détaillée dans beaucoup d’articles auparavant…
Revenons plutôt rapidement sur l’entre-deux projets: après un Charo Life très critiqué et un buzz remis en question, le rappeur est revenu avec un Zifukoro carré plus affamé que jamais avec DJ Bellek aux manettes et des feats XXL tels que Maitre Gims, Booba, Gradur, Kalash ou SCH.
Malgré le disque d’or assez rapide (et le très récent disque de platine) ainsi qu’une critique plutôt accueillante, Niska avouera ne pas avoir été complètement satisfait (bien qu’il ne soit pas non plus déçu), considérant que Zifukoro contenait des prises de risques inutiles. Par peur de ne pas rester authentique, Korozifu revient aux bases de son art et prouve aux non-convaincus que le rap avec un grand R est son terrain de jeu. Tout cela commence à travers son freestyle Couvre-Feu aux côtés de Kalash, Damso et Booba.
La vidéo devient rapidement virale et ce freestyle devient un « classique » de Niska. Dans son retour aux sources, Niska enclenche la deuxième vitesse lorsqu’il sort le son Commando qui non seulement reçoit un franc succès mais qui en plus profite du coup de pouce des vidéos réactions de youtubeurs américains et anglais. Niska confirme son statut de poids lourd de cette année 2017 en sortant ce qui peut être aujourd’hui appelé « le hit de l’été »: Réseaux.
➡️ Mission 1 : Après Zifukoro, à l’assaut du grand public
La première mission de Niska avec cet album était de diffuser la trap au grand public. Comme énoncé plus haut, le rappeur d’Evry a muri son buzz petit à petit suite à Zifukoro. Niska a enchaîné les sorties de ses freestyles baptisés Ke du sal, histoire de faire comprendre qu’aucune « douille » ne sera placée. Le rappeur ne cherchera aucunement à faire de la soupe radiophonique, juste à servir à son public des morceaux qui lui correspondent, et à être là où on l’attend.
Paradoxalement, ces morceaux « sales » auront une bien meilleure réception qu’un Bella Ciao à l’époque de Zifukoro, à l’image du très bon Chasse à l’homme, qui est sûrement le meilleur « banger de rue » de cette année 2017.
À c’qui paraît / La trap a fait son temps, ils racontent que d’la merde / Regarde, nous, on brasse encore
Après l’arrivée magistrale sur la Trap de Kaaris, tout ce que les rappeurs pouvaient faire était décrié par une partie du public comme du sous-Kaaris ou parfois du sous-Migos et consorts. Le style était devenu redondant aux oreilles des ces auditeurs, et certains d’entre eux le voyaient comme limité ou le voulaient mort. Niska est un amoureux de ce style et a décidé coûte que coûte de le faire vivre, et surtout de le diffuser. C’est alors fièrement au refrain de Tuba Life qu’il annonce que lorsqu’on l’annoncait mort la Trap est revenue plus grande que jamais, et pour cause. Des acteurs de ce style tel que Niska ont franchi un cap en faisant pleuvoir les certifications.
📀🇫🇷 Le single #JSuisDansLBaye de Niska est certifié or !
(10 millions équivalents streams) pic.twitter.com/JZat6O58v3— Ventes Rap (@VentesFRap) September 11, 2017
Le grand public semble conquis, Neymar danse sur Réseaux et les musiques de son album occupent les 9 premières places du top single. Niska réalise le meilleur démarrage ventes en rap de cette année 2017 (63 250 en première semaine). Le public ne cherche plus à être ménagé et ne veux pas qu’on lui mente, l’authenticité est désormais le mot d’ordre du rap contemporain.
Mission réussie
➡️ Mission 2 : Niska, l’authenticité à tout prix
Lorsqu’un rappeur s’apprête à sortir un projet aussi attendu que Commando, il est fréquent que ce dernier dans un soucis de vouloir « trop plaire à tout le monde » finisse par se perdre, et par la même occasion finisse par décevoir son public. Niska a décidé d’être le plus « Niska » possible sur cet album. L’erreur à ne pas faire lorsqu’on parle de Niska, c’est de penser que l’authenticité ne s’accorde pas avec mainstream. Un son tel qu’Amour X nous le démontre, c’est du grand Niska. Pendant près de 3 minutes le rappeur nous parle de sa « collaboratrice ».
Tu peux garder tous mes secrets, t’es ma (collabo)/
Te toucher m’donne confiance en moi, t’es ma (collabo)
Une femme capable de garder tout ses secrets et prête à le protéger, le tout accompagné de vocalise auto-tuné. Une ambiance et un thème typique pour un rappeur qui a pour unique vocation de toucher un public large cependant Niska lui joue de son amour pour le second degré et nous explique que la femme en question est son arme.
Faire du bruit, c’est pas la peine / Si tu t’enrayes, on s’prend la tête / Si tu t’enrayes, on s’prend la tête / Toi et moi, les ennemis disent qu’on fait la paire
Le second degré est d’ailleurs l’un des mots d’ordre de ce projet, comme on le voit clairement sur des morceaux comme BOC où les Ad-Libs transforment un simple morceau club en une grande blague. Niska ne cache pas sa volonté de faire des tubes, rien d’étonnant quand on se rend compte que tous les sons du projet sont radiophoniques. Ce que ce dernier affirme fièrement: « J’sais qu’j’suis attendu, les nerfs sont tendus / Chaque nouveau son, je recherche le be-tu ».
Mission réussie
➡️ Mission 3 : Réaliser un album structuré et cohérent?
Ce que Niska a le plus retenu de Charo Life, c’est qu’à cette époque il n’était pas prêt à réaliser un projet « seul », ce que Niska a retenu de Zifukoro c’est que sa musique n’est pas faite pour être cloisonnée par une direction artistique à proprement dites
Dans Zifukoro le rappeur a laissé la partie technique à DJ Bellek qui a été en quelque sortes le DA du projet, ainsi que le beatmaker pour la majorité des sons. Très peu de reproche à faire à cet album qui en lui même est structuré et cohérent calibré avec tous les sons types d’un album de rap des années 2010: « Le banger », « Le son radio », »Le son afro ».
Dans Commando le rappeur a décidé de tout prendre « seul » en abandonnant le côté structuré les pistes, sont dans l’ensemble de la même veine, mais ne suivent pas une logique, Commando est surement meilleur à écouter en aléatoire que dans l’ordre.
Les tracks n’ont pas de structure type d’un couplet à l’autre, le nombre de mesures change, ce genre de format laisse à Niska la place d’exprimer toute son énergie chaque track. Du début à la fin, la voix de Niska ne fait aucune pause entre ad-libs, refrain, pont et couplets.
Bien que tout le travail fait autour est carré que les prods de Pyromane Beatz, Double X ou Christopher Ghenda soient de haut vol et que chaque couplet ou refrain de Niska soit pertinent l’incohérence était nécessaire à l’achèvement de ce projet. Ce dernier ne pouvait donc pas être structuré.
Échec de la mission
Avec une stratégie spontanée, désordonnée, l’opération Commando avait pour but de ravir un public large tout en conservant les fans de la première heure de Niska. Avec Réseaux qui bat son plein et des morceaux comme Salé qui poourrait être l’hymne de Niska au même titre que Macarena pour Damso ou Finis-Les pour Alonzo, l’opération est officiellement une grande réussite.