Bakari est un artiste originaire de Liège, en Belgique. Jeune rookie talentueux à la mélodie facile, il nous présente cette fois son nouvel EP, intitulé Sur écoute : Saison 1. Une référence claire à la série culte The Wire. L’EP comporte 7 titres et ne comporte qu’un seul invité en la personne de RojensRPT, membre du groupe UZI Gang dont l’artiste est très proche. Entre vécu et mélodies, le rappeur nous immisce dans sa vie et ses problèmes tout au long du projet. Textes crus, ambiances planantes aux couleurs blues, RNB et bien évidemment rap sont au rendez-vous. Un mélange éclectique du fait des ses différentes inspirations qui nous procure une balade musicale apaisante durant l’entièreté de l’opus.
Ventes Rap : Quels sont tes premiers retours sur les sons de l’EP ?
Bakari : Pour l’instant, ça varie selon les jours : un coup ce sera Sommet, un autre c’est Comme les autres puis encore un autre ce sera A6. Ce sont les trois qui reviennent le plus. Je suis très content des retours et j’ai hâte d’envoyer la saison 2, qui est d’ailleurs déjà prête.
Ventes Rap : Ton dernier EP était sorti en 2018 et s’appelait Kaléidoscope. Peux-tu me parler des retours sur cet EP également ?
Bakari : C’est un projet qui n’avait pas forcément fait beaucoup de bruit à l’époque, mais qui m’a permis d’ouvrir des portes. Il a une place très importante dans ma vie. J’ai eu beaucoup de chance que ce projet se retrouve dans les mains de bonnes personnes et m’ont donc permis d’être là où j’en suis aujourd’hui.
Ventes Rap : Tu n’as donc pas ce symptôme où tes fans te réclament de faire un son semblable à ceux de tes débuts ?
Bakari : On m’en demande toujours de temps en temps. Les fans me demandent de refaire un titre comme Barillo, par exemple. Mais je pense c’est le syndrome propre du fan qui est un peu nostalgique, on ne peut pas échapper à ça.
Ventes Rap : Ton EP Kaléidoscope était une sorte de prémisse à ce que tu fais maintenant si je ne me trompe pas ?
Bakari : Exact, c’était une carte de visite où je m’essayais à pas mal de nouveaux styles afin de trouver le mien par la suite. Ça m’a permis de voir les retours de mes fans sur ce qu’ils apprécient et également de voir sur quel type de son je me sens le plus à l’aise. C’est à partir de cet EP là où je m’essaie au chant d’ailleurs. Avant c’était uniquement du rap brut.
Ventes Rap : Tu te souviens de ton premier son où tu as commencé à chantonner ? Étais-ce avec UZI gang ?
Bakari : Il n’est jamais sorti, il était nul [hahaha]. Ce n’était pas avec UZI Gang si je me souviens bien, même si on a fait beaucoup de sons. Nos liens sont différents, c’est une autre relation qu’un simple groupe de rap, on se connaît depuis très longtemps et ce sont mes frères. Ça va au-delà de la musique.
Ventes Rap : Je me demandais justement s’ils t’avaient aidé sur la conception de ton EP ?
Bakari : Pas vraiment. Comme je t’ai dit, c’est une relation au-delà du rap. Par exemple, lorsque je suis en séminaire, je suis tout seul. Même si c’était logique de mettre RojensRPT dans mon projet, ça s’est fait naturellement. Pour tout ce qui est de la conception ou de la direction artistique, c’est mon équipe et moi qui faisons ça. Avec l’aide de Franck Lucazz qui m’aide beaucoup.
Ventes Rap : Franck Lucazz est une de ces personnes qui t’ont découvert sur ton EP Kaléidoscope et qui l’ont fait tourner le projet dans les bonnes mains, si je ne me trompe pas ?
Bakari : C’est ça, il m’avait en réalité découvert sur le média belge Tarmac. Après ça, on s’est connecté sur Instagram et il a crée la connexion entre Mouss Parash et moi. Je lui en suis très reconnaissant.
Ventes Rap : J’ai appris que tu écrivais uniquement sur l’instrumental, t’arrives-t-il d’avoir des poussés d’inspirations dans des moments de la vie de tous les jours dont tu te sers après ?
Bakari : Ça m’arrive de temps en temps, d’avoir des petites punchlines comme ça qui viennent en tête et que je note directement pour les réutiliser derrière… Mais jamais un texte complet. Je préfère, comme tu l’as dit, écrire sur l’instrumental directement. J’ai besoin d’un BPM afin de concevoir et mettre en place mes flows, mes placements etc… Par exemple, je note des mots-clés sur une punchline que j’ai en tête et je vais la formuler plus tard afin de trouver une phrase qui colle en lien avec la prod. Pour les mélodies, c’est la même chose. Je garde tout en tête et dès que j’arrive devant le micro, je pose ce que j’ai imaginé comme schéma.
Ventes Rap : Est-ce que tu t’es déjà forcé à la création en dehors de ces moments là où tu es en studio ?
Bakari : Non, pour moi la musique doit rester spontanée et instinctive. Je ne peux pas me forcer à créer quelque chose si je n’en ai pas envie. En séminaire, il m’arrive de ne rien trouver pendant 2 heures sur une instrumentale et on passe à la suivante. Ça fait un peu perdre du temps mais je pense que c’est la meilleure recette pour la musique : si tu ne le sens pas, il ne faut pas le faire.
Ventes Rap : La page blanche t’est-elle déjà arrivé ?
Bakari : Ouais, c’est déjà arrivé mais quand ça m’arrive j’arrive à peu près à comprendre la cause. C’est généralement parce que je me suis trop enfermé en studio et qu’il faut que j’aille m’aérer, vivre un peu, voir des choses. Dans ma musique, je m’inspire de ma vie. A un moment donné, il faut forcément que je m’échappe du studio et que je prenne l’air. Mélodie et texte vont de pair dans ma conception de la musique. S’il n’y a pas le texte, il n’y aura pas les mélodies et inversement.
Ventes Rap : Sur ton EP on ressent un côté très introspectif de ta vie mais qui passe par les mélodies justement
Bakari : Je me sers justement des mélodies pour ça. Chaque information passe mais tout va dépendre de comment tu vas la délivrer aux auditeurs. C’est quelque chose que j’ai compris il n’y a pas longtemps. Si tu souhaites parler de choses dans tes textes qui sont dures, la mélodie est le meilleur outil pour qu’un grand nombre de personnes se souvienne de ce que tu dis. La musique est dans tous les cas un peu un exutoire où je raconte des choses que je ne dis pas forcément à des personnes dans ma vie. Certains se retrouvent là-dedans et ça me touche de pouvoir procurer cette sensation. Mais d’un autre côté, ça m’est déjà arrivé de me demander si je suis prêt à assumer ce que je viens d’écrire.
Ventes Rap : Ton titre Dans ma rue a une sonorité un peu rock, peux-tu me parler de ce son ?
Bakari : C’est sans doute à cause de l’instrumental que ça sonne un peu rock, c’est le compositeur qui est un guitariste qui l’a composé, JulioBeat. Il est à l’aise dans la guitare et d’autres instruments et ça donne un côté un peu plus brut à la chanson ce que j’adore. Mais c’est vrai que j’ai beaucoup d’influence et de tout style. Par exemple, j’adore System Of A Down mais je n’essaye pas de faire un type de son comme ils le feraient. J’essaie juste de prendre toutes mes influences et d’en tirer quelque chose, afin de créer mon truc à moi derrière.
Ventes Rap : On ressent d’ailleurs tes influences et ta couleur musicale sur cet EP mais aucun son ne ressemble à un autre
Bakari : C’était une volonté de trouver un tronc commun à ma musique sans pour autant se répéter et faire la même chose. J’avais pas envie que les auditeurs fassent le tour rapidement. Avec mon équipe, on essaie réellement de garder cette base commune tout en modifiant la forme en fonction des morceaux.
Ventes Rap : T’es-tu déjà essayé à d’autres sonorités plus club voire à de l’égotrip pour des morceaux ?
Bakari : Dans la forme, on peut dire que oui. Mais dans les sujets que je traite, je ne pourrais pas changer. Ce sera toujours ma vie que je raconte. Je ne dis pas que je suis un dépressif ou quoi que ce soit [rires] mais je n’ai pas encore eu le moment où j’ai eu envie de faire un gros son club si l’on peut dire. Pour l’instant, les moments qui me marquent le plus ce sont ceux qui sont difficiles. Quand j’ai commencé le rap, je faisais de l’egotrip et du storytelling, mais c’était vraiment au début quand je rappais bête et méchant. En grandissant j’ai très vite arrêté, ça ne m’intéressait plus. Je ne suis plus comme ça.
Ventes Rap : Question à part mais je posais la question de comment était l’ambiance dans ta ville quand le Standard de Liège gagnait ?
Bakari : [rires] Bah écoute, en réalité moi j’ai habité à Sclessin deux ans et c’est le quartier où il y a le stade. J’habitais à 200m du stade. Les jours du match c’était compliqué, il y avait trop d’ambiance avec pleins de voitures qui passe, des bagarres avec les autres clubs, etc… C’était n’importe quoi, la rue principale du quartier était bouchée, la police était à l’affût car il savait que ça allait être la merde mais c’est des supers souvenirs, surtout qu’ils avaient gagné quand j’étais petit. Même si je suis plus branché MMA et basket, c’est des moments qui marquent.
Ventes Rap : On sent que tu es vraiment attaché à cette ville. Tu avais déclaré que lors de ton futur et premier Planète Rap, tu organiserais un rassemblement avec les mecs de Liège.
Bakari : C’est obligé ! Et je le ferais, je suis le premier de là-bas à avoir une première lueur d’espoir de succès si on peut dire. Je ne peux pas y aller en mode solo, la ville est petite et on se connaît tous, les autres rappeurs sont des personnes avec qui j’ai grandi, je me dois de ramener ce vivier d’artistes talentueux quand j’aurais mon premier planète rap.
Ventes Rap : Pour revenir sur le projet, quel est le son le plus ancien que tu as composé sur cet EP ?
Bakari : Pour te dire, quasiment tous les sons sur cet EP ont trois, quatre ans déjà. Comme les autres, je l’ai fait en 2018. C’est le premier son que j’ai fait après Kaléidoscope. Il a une touche un peu RnB Blues, c’était le mood à cette époque. Il y a juste A6 qu’on a fait l’année passé. A la base, on devait faire un album. Mais la pandémie a un peu tout chamboulé et on a divisé l’album en 3 parties qui seront des EP. Je suis déjà en préparation sur un futur album, et il va être pas mal. Je peux te le dire.