Fin août, Raphaël Da Cruz (Mouv, OKLM, ABCDR) annonçait à l’occasion du passage de l’équipe du podcast No Fun au festival Rock en Seine la sortie d’un spin-off intitulé La Source. Ce nouveau format mensuel, dont le premier épisode devrait voir le jour le 15 septembre prochain, est consacré au sample et à l’intermusicalité. Raphaël Da Cruz précise : « C’est une émission dans laquelle on part d’un morceau contemporain de rap, de R&B, de musique électronique, qui n’a pas plus de 30 ans, et on essaye de revenir à la source, à son inspiration, et même au-delà, c’est-à-dire à l’inspiration du morceau samplé. » L’exercice consiste à expliquer comment chaque artiste s’est approprié les morceaux précédents, à la fois du point de vue musical et technique. « Je te donne l’exemple du pilote qu’on a déjà enregistré, qui va être le premier épisode : le morceau Blood On The Leaves de Kanye West sample le morceau Strange Fruit de Nina Simone, et la chanson de Nina Simone est elle-même reprise d’une chanson de Billie Holliday. L’idée, à chaque fois, c’est de remonter à la source et de raconter une sorte d’histoire généalogique des musiques avec à chaque fois des cas particuliers. » Le sample, c’est un sujet qui passionne Raphaël Da Cruz depuis quelques années, déjà, il l’a abordé de long en large dans ses artistes sur l’ABCDR du Son et a dernièrement co-signé avec Aurélien Chapuis un Guide des samples français dans le hip-hop américain pour RedBull. « On n’est plus sur de l’actu flood comme No Fun, on est sur quelque chose de plus froid, de plus historique, comme ce qu’on pouvait faire avec les rewinds et qu’on va continuer à faire je pense, mais avec cette fois ci ce côté historique. Surtout, contrairement à ce qu’est No Fun, c’est-à-dire un noyau dur avec toujours les mêmes têtes, j’ai été cherché des spécialistes de chaque genre musical. J’ai été cherché des journalistes spécialisés dans la musique classique, la soul, la musique électronique… » Pour autant, tant au niveau de l’identité visuelle que des annonces, La Source affiche son rattachement à No Fun. « Aujourd’hui, la marque No Fun est très bien installée et c’est important pour le public qui nous suit d’avoir une identité, celle de podcast à la fois -en toute modestie- érudit, mais à la fois un peu conversationnel, de dialogue et pas seulement une sorte d’émission très solennelle. L’idée, c’est que ça soit dans le giron de No Fun, une sorte de spin off hors-série mais qui adopte un angle différent. » Le succès de No Fun s’inscrit plus généralement dans une période de croissance du format podcast ; aux Etats-Unis, les revenus publicitaires de ce marché devraient d’ailleurs doubler entre 2017 et 2020 pour passer de 3,9 millions de dollars à 659 millions de dollars. « Je pense que le succès du podcast est un peu similaire à celui de la vidéo à la demande, aujourd’hui les gens ne veulent plus être captifs d’un flux continu de médias et d’informations, ils veulent prendre le temps et saisir les moments d’écouter et voir les choses. Généralement, les podcasts ont une durée de 20 à 40 minutes, c’est un trajet en transports, faire le ménage… » Pour Binge Audio, éditeur de No Fun et de La Source, cette montée en puissance du format s’est manifestée de manière on ne peut plus concrète, à savoir par un investissement important du groupe Les Echos – Le Parisien (LVMH). « La Source, dans le flot de Binge, c’est un tout petit élément. Ils lancent plein de nouveaux podcasts qui sont plus portés sur des sujets sociétaux. » Le succès de Binge et des podcasts réside finalement dans la volonté de se détacher de l’écran manifestée par une large partie des utilisateurs, une tendance que les fondateurs Gabrielle Boeri-Charles, Joël Ronez et David Carzon ont vite fait d’assimiler en visant à terme le marché des enceintes connectées. « Il y a sûrement une partie des personnes qui veut passer à de l’audio unique, ce qui permet en plus d’être encore moins passif que la vidéo où on est capté visuellement et auditivement. Mais il y a encore deux profils différents, une partie voudrait aussi de la vidéo. »