La recette pour vendre dans le rap

Il est minuit 23 , un mardi soir et le chômeur que je suis téma le replay de Rohff à TPMP avec du Asap Ferg dans les oreilles, défile son fil d’actu Twitter et là le vanneur qui est en moi tombe sur de quoi refaire mes abdos enfouis sous ce qui représente le mieux la banlieue (un grec frites): les ventes de la semaine… Mon Dieu… C’est catastrophique de voir que des mecs vendent moins que le chiffre qui sert de titre à leur album ou leur blaze, tandis que deux autistes à grandes oreilles font platine. J’en viens donc à me poser cette question: pourquoi les rappeurs ne vendent plus? (Si vous avez aussi ce genre de questions à minuit et demi, remettez-vous en question et trouvez un taff).

Pourquoi les rappeurs ne vendent plus?

Certains me diront que c’est à cause des fuites… Oui mais non: déjà, il faut savoir que de nos jours beaucoup de labels font fuiter volontairement les projets avant leur sortie (en mauvaise qualité) histoire de prendre la température et d’augmenter les stream des singles. Et puis, on va pas se mentir, il y a certains rappeurs dont le peuple n’a clairement rien à foutre en majorité, ce qui fait donc que leurs albums ne fuient pas. Ceci dit les leaks peuvent ne pas jouer en la faveur du MC, car si l’album est mauvais les fans ne se feront pas baiser la gueule en le découvrant au dernier moment après avoir dépensé l’équivalent d’un radikal frites canette et n’iront pas l’acheter, même pour soutenir.

D’autres diront que pour vendre de nos jours il faut faire ce que notre comorien préféré (enfin moi c’est plutôt Alonzo mais bon) a nommé la zumba c’est-à-dire des sons légers, dansants fait pour les radios. Encore une fois cet argument se tient quand on voit les scores affolants de Gims et Jul pour dont chaque album touche au minimum un disque de platine (L’OVNI certifié platine tout juste deux semaines après sa sortie!), mais peut être aussi contredit, car quand on regarde par exemple L’homme au bob de Gradur (disque d’or), Corleone de Lacrim (platine il me semble ), ou encore A7 (disque d’or), Dans la légende (platine), etc.

Que faut-il faire pour vendre alors?

Pour répondre à ça j’ai deux solutions, 9 lettres : Booba ou S.O.U.N. Avant de m’insulter de ratpi ou de mecs tellement fan de trap qu’il met des initiales partout, laissez moi parler. Concernant Booba… Bon, pas besoin de s’étaler sur ce sujet. Qu’on l’aime ou non, c’est l’un des plus gros vendeurs du game hors zumba et à la tête de nouveaux médias, il n’a qu’à poster un extrait de 30 secondes sur Instagram pour que tout le rap français connaisse cet extrait par cœur… Donc moi, grand ratpi à jambe de bois et crochet à la place de la main gauche, m’engage à ne pas parler de cette éventualité durant l’article. Maintenant, je vais vous expliquer ce qu’est S.O.U.N. Non, ça n’a rien à voir avec l’expression comorienne « coming soon » et non ce n’est pas le nom d’un nouveau rappeur au flow autotuné, ça signifie « Sympathie, Originalité, Univers, Nouveauté ». Oui, j’ai trouvé ça tout seul comme un grand et j’ai bien l’intention de déposer cette formule.

• Sympathie

Aujourd’hui le personnage du rappeur est plus vendeur que sa propre musique, les gens attachent beaucoup d’importance à ses apparitions dans les interviews, sa relation avec son public notamment sur les réseaux sociaux. La majorité de la nouvelle génération l’a bien compris, à un tel point qu’ils se mettent tous à donner des blazes à leur fanbase comme si c’était des sectes mais à part les sheygueys, les charos et les ratpis, j’ai pas trop l’impression que ça fonctionne. Enfin bref, je disais donc qu’il fallait avoir une image sympathique. Et celui qui a réussi à le mieux assimiler ça c’est JUL AKA le mec le plus cool du rap, même moi qui n’arrive pas à tenir un album entier, à chaque statut Facebook qu’il poste où il répond à quasiment chaque commentaire j’ai envie d’acheter chaque projet en 6 exemplaires, et à l’heure qu’il est le marseillais enchaine les centaines de milliers de ventes en faisant sa promo avec des posts insta et des snaps bourrés de fautes (on lui pardonne avec plaisir).

• Originalité

Ceux qui ont lu mon article sur la trap savent à quel point j’aime cette tendance, et que j’en suis un fervent défenseur mais il faut reconnaître qu’elle n’a pas que des avantages, car elle a créé des milliers de clones avec le même flow, la même gestuelle, les mêmes clips et les mêmes paroles. Du coup quand un rappeur arrive avec un truc original, bah même si il rappe pareil ça cartonne: par exemple Gradur qui est arrivé avec son délire de Bob, de militaire-dealer et qui est aussi le pote de tout le rap français n’a rien apporté de spécialement nouveau mais pourtant ça a marché, ou encore Kalash Criminel et sa fameuse cagoule (qui était pourtant déjà utilisée par Siboy, et encore avant Teuchiland…).

• Univers

Aujourd’hui on veut plus que de la musique, on veut s’identifier, on veut se reconnaître dans les sons ou avoir envie de se reconnaître, que les rappeurs nous mentent comme ils l’ont toujours bien fait… Ou pas. En gros on veut avoir l’impression d’être dans un film, de ressentir une certaine atmosphère quand on écoute les sons. Et le boss dans ce domaine c’est bien SCH , avec des sons comme Champs Elysées où il donne envie de faire partie de la France d’en haut, celle qui roule en féfé (pas louée) sur les champs, qui boit des coupes de champagne qui font le prix de cette féfé et qui ont le prix d’une clio sur le poignet. Il y a aussi une nouvelle génération de rappeurs comme Josman, Biffty, Vald, Jorrdee et d’autres qui ont également été capables de développer des univers très particuliers qui leur ont permis de fidéliser une fanbase.

• Nouveauté

Tout ces rappeurs nommés ont un point communs : ils sont nouveaux et apportent quelque chose de nouveau. A ce niveau, le meilleur et plus récent exemple reste celui de PNL, deux frères du 91 qui sont passés en trois albums d’artistes underground méconnus à stars nationales (et internationales). Les précurseurs de la cloud music en France, vu comme des génies par certains (dont moi) et incompris par d’autres (le bas peuple), ont apporté un truc totalement nouveau avec des sons 100% autotunés, aérés, planants, qui donnent envie de se poser dans son lit avec un joint et une ou deux… Ou trois belles femmes. Et ça marche pour eux! Pas de radio, pas de promo, juste des clips magnifiques et de la musique (putain quelle rime de batsssaard) et ils se mettent à plaire à Eva Mendès.

Si toi qui lis ça tu es rappeur et si tu perces en appliquant cette théorie, j’exige des royalties. Si toi qui lit ça tu es rappeur et si tu ne perces pas en appliquant cette théorie, t’es sacrément con d’avoir appliqué les conseils d’un mec de 21 ans qui ne sait ni chanter ni rapper. Sur ce, Shalom Salam Salut!