Avec sa rubrique « Le professionnel du mois », Ventes Rap met à l’honneur les décideurs derrière les plus belles réussites artistiques et commerciales du moment. Managers, producteurs, éditeurs mais aussi artistes entrepreneurs seront ainsi invités à revenir sur leurs carrières respectives, leur éthique de travail et leur vision de l’industrie musicale. Après Oumar Samaké en décembre, c’est au tour de Rémy Corduant d’être mis à l’honneur dans cette édition. En janvier 2023, après plus de cinq ans au sein de Yuma Productions, il annonce le lancement avec ses deux associés Éric Bellamy et Macha Mouline d’une nouvelle structure dédiée au live : Nouëva Productions. Cette dernière intègre des têtes d’affiches (Aya Nakamura, Damso, Dinos, RK…) ainsi que des artistes en développement tels que Bianca Costa, Doria ou Oxlade. Son lancement se fait sous le feux des projecteurs. Nouëva Productions s’occupe de la mise en vente de la tournée d’Aya Nakamura, qui remplit chacune de ses Accor Arena en moins de 15 minutes, pour un total de 3 concerts à guichets fermés dans la salle de concert parisienne emblématique. L’année 2023 se poursuivra en fanfare pour Nouëva avec le premier concert de Dinos à l’Accor Arena, une nouvelle fois à guichets fermés, le 10 mars 2023.
Nouëva Productions : une nouvelle aventure
Le 31 décembre 2022, Yuma Productions tire sa révérence après 13 ans d’activité. « Quand une boîte de productions de spectacles ferme, elle rend tous les contrats des artistes. S’il y a des bénéfices, c’est le contrat de l’artiste et un chèque qui lui sont rendus. S’il y a des pertes, le contrat est rendu mais les pertes sont avalées par la société qui ferme. », explique Rémy Corduant. Cependant, grâce à un réseau acquis depuis vingt ans dans l’industrie musicale et grâce à des relations privilégiées avec les artistes, Rémy Corduant et ses associés parviennent à en convaincre un grand nombre de rejoindre le navire Nouëva Productions : Damso, RK, Dinos, Fally Ipupa entre autres. Nouëva signe également Aya Nakamura (qui ne faisait pas partie du roster Yuma à cause du Covid), Doria ou encore Benjamin Epps. Rémy Corduant dévoile une nouvelle ambition avec Nouëva : « On veut commencer à ne pas faire que des concerts. On veut explorer d’autres choses, notamment au niveau du sport. On reste dans la production de spectacles, mais au sens large : des festivals, des évènements sportifs, etc. »
Rémy Corduant : « Aya Nakamura, on aurait pu faire un Stade de France. »
« Aya Nakamura, on aurait pu faire un Stade de France. », explique Rémy Corduant. « Quand tu remplis 3 Bercy en 15 minutes, tu sais que tu peux le faire. Cependant, on a choisi de faire 3 dates car le public mérite 3 dates. L’absence de démontage et de remontage rend l’économie rentable. On en a parlé beaucoup avec Aya, et notre réflexion a été ‘si on fait le Stade de France, qu’est ce qu’on fait après ?’. Il ne faut pas oublier qu’elle n’a que 27 ans, elle a le temps pour ça. Je préfère qu’on fasse 3 Bercy, des festivals à l’étranger, et plus tard dans sa carrière ce Stade. » Cette relation privilégiée avec l’artiste s’explique par une connaissance de longue date, et aussi par une implication dans chaque détail de la tournée : « Je suis directeur général délégué de Nouëva, associé avec Eric, mais je fais toute la direction artistique de nos artistes. C’est très rare que je prenne des scénographes extérieurs. Je me fais épauler car je n’ai pas la maîtrise technique, mais tout sort toujours de ma tête. Avec Aya, on a toujours fonctionné comme ça. » Cette maîtrise globale des aspects créatifs et business du live s’expliquent par un passage de 15 ans au sein du label Din Records au début de sa carrière. Il occupait alors les fonctions d’ingénieur lumière, de régisseur et de tour manager.
Live, un univers à part
Domaine assez opaque pour le grand public, le business des concerts aurait pu connaître une mutation similaire à celle de la musique enregistrée avec le streaming. Cependant, pour Rémy Corduant, ce sont deux domaines qui n’ont rien en commun : « Il y a des artistes qui vendent peu de disques, mais remplissent des salles partout. Et il y a aussi des artistes qui font disque d’or, et lorsque tu annonces une Cigale, tu ne remplis même pas la moitié, et donc tu es obligé de l’annuler. » Il nuance cependant son propos : « Evidemment, si l’artiste vend des millions de disques, il ne devrait pas avoir de problèmes à remplir des salles. Par contre, de nombreux artistes peuvent être encore en développement sur l’aspect live alors qu’ils vendent des disques. Si tu n’as jamais fait de tournée, tu es en développement car on ne connaît pas ta capacité scénique ni celle à remplir des salles. » Il conclut en disant que malgré la nécessité d’être rentable, son but premier est d’offrir au public des souvenirs mémorables : « On se concentre avant tout sur l’artistique plutôt que le buzz. Je ne crée pas des concerts, je crée des spectacles. Même en développement, je veux avoir une identité visuelle forte. »
Photographies : Arthur Bresset