Peu avant la sortie de son album, Pusha T révélait sur The Angie Martinez Show que Kanye West avait dépensé 85.000 dollars au dernier moment pour remplacer la pochette de DAYTONA par une photographie de 2006 de la salle de bain de l’appartement de Whitney Houston à Atlanta. Il y a quelques jours, nous apprenions grâce à une interview du New York Times que Kanye West avait écrit l’intégralité des textes de son album Ye dans les huit jours précédant sa sortie. Plus récemment, à l’occasion d’une interview pour Big Boy’s Neighbourhood, Tayana Taylor a affirmé que « pour lui faire plaisir » et vraisemblablement pour coller à son calendrier de sorties, le producteur avait sorti une version incomplète et inachevée de son album K.T.S.E. Ces quelques anecdotes sont finalement assez révélatrices du rythme de travail adopté par Kanye pour ce fameux « Ye Summer » au cours duquel auront vu le jour DAYTONA de Pusha T le 25 mai, Ye le 1e juin, Kids See Ghosts le 8 juin, NASIR le 15 juin et K.T.S.E. le 23 juin. Malgré la fin des « sessions du Wyoming » durant lesquelles la série de cinq projets a été enregistrée, Kanye a d’ailleurs exprimé la volonté de poursuivre sa lancée de collaborations et de sortir un album par semaine pendant 52 semaines, soit un an. Ont notamment été évoqués les noms de Chance the Rapper (confirmé par Francis Farewell Starlette), Bump J et Sly Polaroïd… Du bouillonnement créatif à une réalisation hasardeuse, la frontière est fine, et Kanye l’a franchie à plusieurs reprises depuis le début de l’été. Entre la réception critique perplexe de NASIR et les accusations de sample non autorisés des labels The Numero Group et PAN, l’incapacité évidente de Kanye West à suivre son propre calendrier et la précipitation qu’elle entraîne n’ont rien de positif. Réfugié derrière son éternelle étiquette de génie, l’artiste se lance à corps perdu dans une lutte contre ses propres limites qui tient plus de l’autodestruction que de la création, et cela se ressent dans l’alchimie douteuse de certaines de ses collaborations. L’album Ye lui-même, bien que salué comme un témoignage d’une rare intimité à une époque où le thème des troubles mentaux a définitivement pris ses marques dans la musique urbaine, est loin du degré d’innovation musicale de YEEZUS ou même dans un sens de The Life of Pablo. Seule réussite dans un magma d’idées inexploitées ou mal exploitées, DAYTONA sera finalement l’étape la plus palpitante d’un « Ye Summer » qui a tout du coup d’épée dans l’eau.