De tous les artistes qui, à un moment dans leur carrière, ont participé à la merveilleuse épopée pionnière de la Three 6 Mafia, Koopsta Knicca est sûrement l’un des moins reconnus. Et pour cause : s’il est l’un des premiers à avoir rejoint l’aventure en 1994 — année de la sortie de la mixtape Smoked Out, Loced Out —, il a été contraint de quitter le navire en 2000, suite à une incarcération pour vol. De ce fait, il rate le coche de l’album When The Smoke Clears, sorti la même année, le plus gros succès du groupe à l’époque (certifié disque de platine par la RIAA). Décédé en 2013 d’une rupture d’anévrisme, sa mort a marqué les plus grands fans du rap du Sud, malgré une deuxième partie de carrière dans l’ombre de ses congénères. Il faut dire que Koopsta Knicca n’a pas attendu très longtemps avant de briller à l’échelle de sa ville. En 1994, année durant laquelle il entre officiellement dans la sphère Three 6 Mafia, il s’enferme en studio avec les éminents compositeurs Juicy J et DJ Paul afin de travailler sur un premier opus solo. De ce travail de damné naîtra Da Devil’s Playground, un véritable classique de la scène de Memphis à qui il convient d’attribuer tous les lauriers.
Da Devil’s Playground, l’univers cauchemardesque de Koopsta Knicca
À cette époque, l’horrorcore déployée par la Three 6 Mafia est à son paroxysme. Faux satanistes, les membres du groupe se servaient de leurs références diaboliques pour allégoriser leur sombre quotidien de ressortissant des pires quartiers de Memphis. Cette esthétique, c’est sans doute Koopsta Knicca qui en a le mieux fait l’usage sur son tout premier album solo, encore énormément samplé à ce jour — particulièrement le morceau Stash Pot — baptisé Da Devil’s Playground. Le jeune rappeur préfère y adopter des flows parfois presque chantonnés d’une voix faussement douce qui, en réalité, fait froid dans le dos. En outre, ce trésor macabre de la scène de Memphis comporte les balbutiements du triplet flow inventé par son comparse Lord Infamous, notamment sur le titre Front A Busta. Ce disque, plus qu’un simple exutoire, est marqué par la paranoïa permanente de son interprète. Il distille à l’envi ses hallucinations les plus monstrueuses, exacerbées par un tandem magique aux machines : Juicy J et DJ Paul enchaînent les samples judicieux et les effets sonores cauchemardesques. Le mix de l’album, poussiéreux et brumeux, achève de faire de Da Devil’s Underground un train fantôme psychédélique qui oscille entre la quiétude terrifiante et le tumulte macabre.