En 2017, Booska-P révélait un classement inédit dans la sphère rap français : celui des « 20 influents du rap français ». Le média leader du rap français avait décidé de mettre à l’honneur les décideurs qui pouvaient changer des carrières, propulser des artistes et dont l’avis comptait. En 2021, ce classement est de retour, mais avec un changement majeur par rapport à l’édition précédente : aucun rappeur n’a été inclus dans la liste. Booska-P a pris le parti de garder seulement des visages moins en vue du grand public, mais dont le nom est connu de toute l’industrie. Les critères demeurent les mêmes qu’il y a quatre ans : ce sont des hommes et des femmes qui occupent des postes clefs et dont l’ensemble des actions qu’ils mènent dans l’exercice de leurs fonctions pèse sur l’écosystème rap français. L’éventail de personnalités est donc large, incluant à la fois des patrons de label, des directeurs artistiques, des personnalités des médias, ou encore des réalisateurs et des éditeurs. Pour en savoir un peu plus sur ce classement très scruté, nous sommes allé interroger Hamad, co-fondateur de Booska-P.
Les 20 influents, nouveau rendez-vous annuel
Comme l’explique Hamad: « On s’est dit que c’était la bonne année pour y aller. En 4 ans, tout l’écosystème du rap a explosé, et à l’instar des 11 rappeurs à suivre, on veut des contenus forts comme ça qui représentent chaque strate du rap français. » Ce rendez-vous des 20 personnalités les plus influentes du rap français est donc appelé à devenir régulier, et va devenir annuel. Il définit ces personnalités influentes comme des gens qui par leurs actions ont une résonnance sur l’écosystème rap français. Selon lui, ces personnes sont tellement incontournables et identifiées, qu’elles sont sollicitées en permanence. « Dans le game, tout le monde sait qui sont ces personnes et ce qu’elles ont fait. » Une fois ces 20 personnalités sélectionnées, l’équipe de Booska-P a mis en place une série de critères pour différencier les personnalités et donc in fine établir leur classement. « On a jugé par rapport aux faits d’armes de chacun, et notamment leur impact sur plusieurs projets, leur attractivité dans le game et l’influence qu’on sent auprès des autres professionnels. » Etant donné le retour du format, l’équipe Booska-P a tenu à prendre en compte les réussites au cours des deux dernières années. Cependant, dès l’édition 2022, le classement ne prendra en compte que la saison passée (donc septembre 2021-août 2022 pour la prochaine parution du classement).
Une liste centrée sur l’industrie, sans artistes
Si l’on excepte Kore, qui figure en grande partie grâce à sa fonction de directeur du label AWA, aucun créatif à proprement parler n’a été nommé dans ce cru 2021 des 20 personnalités les plus influentes. Exit donc les PNL, Booba, Nekfeu, Fianso, Fifou… Un choix fort assumé par Hamad : « On a décidé d’enlever les rappeurs pour éviter la confusion. En effet il est très compliqué de juger l’influence d’un rappeur dans le rap français, par rapport à l’influence d’une personnalité impliquée uniquement dans la partie business. Par exemple, un Booba aurait pu être inclus en tant que producteur, mais comme il doit sa notoriété avant tout à son statut d’artiste, on trouvait que cela faussait un peu le classement, et c’est pour ça qu’on a décidé de pas le mettre dedans. C’est un des retours qu’on avait eu sur la première liste : la déception qu’on n’ait pas fait deux listes différentes. En plus, l’idée était vraiment de mettre en avant ces personnalités de l’ombre, que le grand public ne connaît pas forcément, mais qui sont décisifs dans l’industrie. »
Plusieurs faits d’armes, une condition nécessaire
Avoir plusieurs réussites à son actif est le critère prédominant par rapport à l’ancienneté dans l’industrie par exemple, ou le fait d’avoir eu un seul très gros succès à son actif : « Si l’on prend Alexandre Kirchhoff, qui est premier du classement cette année, il a eu 3,4,5 gros succès en 2021, et c’est ce qui le rendait légitime aussi haut dans le classement. L’influence, c’est un ensemble de choses. Par exemple, les professionnels savent que quand un jeune artiste est suivi par un Sacha de Bluesky ou par un Mouss Parash sur les réseaux, il faut se mettre dessus. Même s’ils n’arrivent pas à signer tous les artistes, ils sont toujours parmi les premiers à se positionner sur ces artistes-là, et par leur réputation, ils partent avec un avantage. » Hamad explique aussi que certains acteurs qui ont eu un seul très gros succès en 2020 ou 2021 n’ont pas pu être mis dans la liste. « La régularité, c’était vraiment notre critère principal. » Il ajoute qu’il ne voulait pas se contenter d’une simple liste : « Le classement crée une interaction et c’est ce qui amène du piment pour que ce soit intéressant d’une année à l’autre. »
2022 : une année sous le signe de la technologie ?
Pour l’année 2022, Hamad a déjà quelques personnalités en tête, mais ne les dévoilera pas tout de suite: « Au sein de l’industrie, on est déjà au courant des sorties qui arrivent au cours des prochains mois, ce qui fait qu’on a déjà une certaine idée de ce à quoi pourrait ressembler la liste en 2022. » Cependant, l’écosystème rap évolue très vite, les têtes d’affiches explosent en quelques mois à peine, et les outils marketing ainsi que de promotion aussi. Par exemple, concernant Tik Tok, il dit qu’aujourd’hui il n’y a pas encore une incarnation de la plateforme avec des personnalités aussi fortes que celles qui représentent les plateformes de streaming comme Apple Music et Spotify. Cependant, il n’exclut pas qu’une personnalité issue du réseau social fasse son entrée dans le classement l’année prochaine : « C’est encore nouveau, donc il n’y a pas encore quelqu’un qui incarne cette plateforme qu’est TikTok. Demain, il y aura peut-être des agences qui vont se monter, qui seront incarnées par des personnes humaines et qui vont devenir tellement grosses qu’ils auront une vraie influence, et feront leur entrée dans le classement. »