Process est le deuxième projet de 404Billy, artiste du 95 repéré après des freestyles YouTube en 2017 et le projet Hostile sorti l’année suivante. La noirceur est érigée comme esthétique principale sur ce premier projet, au travers notamment de clips en noir & blanc et de textes sombres. Carte de visite plutôt remarquée dans le monde du rap, la transition entre suite de freestyles et véritable projet structuré commence à s’opérer. Hostile gravite entre démonstration technique avec bien souvent des morceaux à couplet unique, à l’image de Error #4 ou Demande à Ton Père, et des morceaux plus ouverts avec une structure plus classique tels que Dissidence ou Azerty. Ce morceau étant d’ailleurs le seul à avoir été clippé en couleur, comme si les quelques lueurs d’espoir qu’il présente dans le fond ou la forme faisaient exception et présentaient l’échappatoire que viserait Billy.
Les couleurs restent à l’arrivée du clip de RVRE en featuring avec Damso, premier extrait de Process. La comparaison entre l’univers de Billy et celui d’un Damso période Batterie Faible est plutôt évidente et il a été repéré par l’artiste Belge avant même son premier projet, puis a été invité à faire les premières parties lors du Lithopédion Tour. Il pouvait profiter de l’exposition de Damso pour faire un morceau facile, mais rien n’y fait, malgré l’ambition affichée, le leitmotiv principal de sa musique restera la volonté d’être authentique. Ainsi, Damso se contente d’un refrain, efficace, mais qui reste discret et laisse de la place au talent de Billy. Une passe décisive salutaire puisque le clip est pour l’instant le seul qui ait dépassé le million de vues. Sur Process, la palette de couleurs du rappeur s’élargit. Rageux ou Espèce ont la véritable forme de singles.
Il fait même preuve d’humour sur le très bon Sombre Fan, qui sert autant à piquer une partie du grand public qui n’aurait pas les codes pour comprendre sa musique (et ne chercherait pas à les avoir) qu’une partie de sa fanbase qui s’identifierait trop à ses propos. 404 Freestyle, à l’opposé, sonne comme un retour aux sources, un passe-passe technique avec le très bon Blaz Pit, sans aucune concession. Process est à l’image de tout ce qu’a pu nous montrer le rappeur jusqu’à présent, un entre-deux d’influences permanent. Tout se construit à la croisée de plusieurs chemins. Un rap résolument moderne mais qui respecte ses aînés : « ça kick sale comme à l’époque de Time Bomb ». Un jeune-vieux « autant puriste que futuriste » à qui « il reste des principes comme les mecs d’antan ». Entre la volonté de succès et celle de ne pas dénaturer sa musique. Entre le noir et blanc et la couleur.
Rare bémol à ce projet, un son comme Rouler où en voulant faire un morceau plus épuré dans les paroles et se voulant hymne mélancolique pour ride nocturne, le texte se retrouve appauvri de la force brute et écorchée vive qui caractérise l’écriture du rappeur. Intégré à l’effectif de l’OKLM Mixtape en 2015, 404Billy aura doucement tracé sa route là où des Damso, Ninho et Hornet ont enchaîné très rapidement. Quatre ans plus tard, il fait son entrée en grande pompe parmi les noms les plus prometteurs de l’hexagone. Là où Hostile se présentait comme carte de visite, Process nous montre que 404Billy a d’autres cordes à son arc et qu’il sait rester toujours aussi incisif quand il le faut. Un des très bons projets de ce début d’année pour un rappeur extrêmement prometteur avec un véritable potentiel pour s’extirper de l’ombre et démontrer son talent à un plus large public. En espérant que la prophétie de ces « tweets élogieux qui [lui] prédisent avenir glorieux » se réalise.